jeudi, novembre 02, 2006

Une petite lecture matinale

... elle s'en allait en maillot le long de la piscine et quand elle eut dépasssé le maître nageur de quatre à cinq mètres, elle tourna la tête vers lui, sourit et fit un signe de la main. Mon coeur se serra, Ce sourire, ce geste, étaient d'une femme de vingt ans! Sa main s'était envolée avec une ravissante légèreté. Comme si, par jeu, elle avait lancé à son amant un ballon multicolore. Ce sourire et ce geste, étaient pleins de charme, tandis que le visage et le corps n'en avaient plus. C'était le charme d'un geste noyé dans le non-charme du coprs. Mais la femme, même si elle devait savoir qu'elle n'était plus belle, l'oublia en cet instant. Par une certaine partie de nous mêmes, nous vivons tous au-delà du temps. Peut-être ne prenons-nous conscience de notre âge qu'en certains moments exceptionnels, étant la plupart du temps des sans-âge. En tout cas, au moment où elle se retourna, sourit et fit un geste de la main au mâitre nageur (qui ne fut plus capable de se contenir et pouffa), de son âge elle ne savait rien. Grâce à ce geste, en l'espace d'une seconde, une essence de son charme, qui ne dépendait pas du temps, se dévoila et m'éblouit. J'étais étrangement ému. Et le mot Agnès surgit dans mon esprit. Agnès. jamais je n'ai connu de femme portant ce nom.

M.Kundera L'immortalité

Ce pouvoir d'éblouissement n'est-il pas le propre du divin ? Le divin ne se dit pas, il est hors du temps et hors de l'espace, comme le geste de cette dame, éternel et immortel.

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